On a conclu un peu vite que le monisme de Spinoza conduisait à une forme d'athéisme. Il le paiera d'ailleurs d'une excommunication prononcée par la Synagogue d'Amsterdam (1656) et manquera même un jour y laisser la vie lorsqu'un fanatique chercha à l'assassiner. Certes, son Dieu n'est ni transcendant, ni créateur, ni personnel, ni origine des valeurs, puisqu'il est la nature. Deus sive natura. Dieu et le monde sont un seul être. Dieu n'est pas une personne qui parle et à laquelle on parle. Les Chrétiens et les Juifs n'y reconnaîtront pas leur Dieu « Juge », « Monarque » ou « Père ». De là à l'accuser d'athéisme, il n'y a qu'un pas !
Il faut s'accorder sur le sens des mots : si l'on entend par « athéisme » une remise en cause du concept canonique de Dieu, tel que développé par les théologies juive et chrétienne, il peut en effet paraître tel. Son Dieu n'est qu'une métaphore. Mais si l'on veut le faire passer pour un libertin, ce à quoi renvoyait à l'époque le terme, à la manière d'un Don Juan cédant à la jouissance immédiate et au matérialisme vulgaire, on se trompe du tout au tout. Spinoza est un philosophe qui n'a en vue que le bien de tous les hommes et qui sait qu'il n'y a de joie qu'éclairée. Un seul mot d'ordre : « Ni rire ni pleurer mais comprendre ».